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Texte copié [et traduit] de ForbiddenKnowledgeTV


Si vous avez vu il y a quelques jours l'interview de Webster Tarpley, cet excellent résumé de la géopolitique mondiale d'aujourd'hui pourra vous paraître encore plus clair, mais SCG (le site "StormCloudsGathering") fait un travail phénoménal : 

...[Q]uand on voit les porte-paroles de la classe dirigeante commencer à diaboliser un pays étranger, la première question à avoir à l'esprit devrait toujours être : "Qu'est-ce qui est en jeu ici ?"

Depuis quelque temps déjà, la Russie, la Chine, l'Iran et la Syrie sont dans le collimateur. Dès qu'on comprend pourquoi, les événements qui se déroulent en ce moment même dans le monde prennent beaucoup plus de sens.

On ne peut pas vraiment comprendre le 11-Septembre et les germes d'une Troisième Guerre mondiale si on ne comprend pas la pression exercée au moyen du pétrodollar, qui a été placée, depuis les années 1970, sur tous les pays qui voulaient acheter du pétrole (...) comme le dit ici SCG, avec l'établissement du Pétrodollar, "...le dollar est passé d'une devise garantie par de l'or à une devise garantie par du pétrole. Il est également devenu la principale exportation des États-Unis."

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Ce système fondé sur le pétrodollar est demeuré sans concurrent jusqu'à septembre 2000, lorsque Saddam Hussein a annoncé sa décision de passer du dollar à l'euro pour la vente du pétrole irakien. Ce fut là une attaque directe contre le dollar, et de loin l'élément géopolitique le plus important de l'année, mais seul un article des médias occidentaux l'a mentionné.

Le mois même où Saddam annonçait qu'il s'éloignait du dollar, une organisation nommée "Le Projet pour un Nouveau Siècle Américain" ("The Project for a New American Century") -- dont il se trouvait que Dick Cheney était membre -- a publié un document intitulé "RECONSTRUIRE LES DÉFENSES DE L'AMÉRIQUE, Stratégies, forces et ressources pour un siècle nouveau". Ce document appelait à une énorme augmentation des dépenses militaires US et à une politique étrangère beaucoup plus agressive, afin d'étendre la domination étasunienne dans le monde. Les documents se plaignaient néanmoins qu'atteindre ces objectifs demanderait des années "en l'absence d'un élément catastrophique et catalyseur - une sorte de nouveau Pearl Harbor".

Ils l'obtenaient l'année d'après.

En se servant de la vive émotion causée par le 11-Septembre, l'administration Bush a pu envahir l'Afghanistan et l'Irak, et faire passer le Patriot Act (v. ici), le tout sans provoquer de résistance importante.

Il n'y avait en Irak aucune arme de destruction massive, et il ne s'agissait pas là de "mauvais renseignements". C'était un mensonge délibéré et calculé, et la décision d'invasion a été prise en toute connaissance du désastre qui allait suivre. 

Ils savaient pertinemment ce qui allait se produire, mais l'ont néanmoins fait en 2003. Dès que les gisements pétroliers irakiens se sont retrouvés sous contrôle US, les ventes de pétrole se sont de nouveau effectuées en dollars. Mission accomplie.

Peu après l'invasion de l'Irak, l'administration Bush a tenté d'étendre la guerre à l'Iran. Le gouvernement iranien était censé travailler à la construction d'une arme nucléaire (...) [mais] après le fiasco irakien, la crédibilité de Washington était sérieusement entamée. Il leur a donc été impossible d'obtenir l'appui international, ni même national, nécessaire à une intervention (...) La campagne de diabolisation de l'Iran s'est néanmoins poursuivie, même sous l'administration Obama. 

Pourquoi ?

Eh bien, serait-ce en rapport avec le fait que l'Iran s'emploie depuis 2004 à instaurer une bourse indépendante pour le pétrole ? Ils mettaient sur pied leur propre marché pétrolier, qui ne serait pas lié au dollar. Les premières livraisons de pétrole par ce moyen ont eu lieu en juillet 2011.

Incapables d'obtenir la guerre qu'ils souhaitaient, les États-Unis ont utilisé l'ONU pour imposer des sanctions à l'Iran. Le but desdites sanctions étant de renverser le régime iranien. Même si elles ont endommagé l'économie iranienne, ces mesures n'ont pas réussi à déstabiliser le pays. Ceci en grande partie grâce au soutien de la Russie dans le contournement des restrictions bancaires américaines.

En février 2009, Mouammar Kadhafi a été nommé président de l'Union Africaine. Il a immédiatement proposé la formation d'un État unifié doté d'une monnaie unique. C'est la nature même de la devise proposée qui est la cause de sa mort.

En mars 2009, l'Union Africaine publia un document intitulé "Vers une monnaie africaine unique". Les pages 106 et 107 de ce document évoquent de manière précise les avantages et les aspects techniques de la gestion de la Banque centrale africaine adossée à l'étalon-or. Page 94, ce document déclare clairement que le succès de l'Union Monétaire Africaine reposerait sur le "lien final entre une monnaie africaine unique et la plus monétaire de toutes les matières premières -- l'or."

En 2011 la CIA est allée en Libye commencer à soutenir les groupes militants dans une campagne destinée à renverser Kadhafi. Puis les États-Unis et l'OTAN sont intervenus et ont interprété une résolution de l'ONU concernant une zone d'exclusion aérienne, afin de rompre l'équilibre par des frappes. La présence d'extrémistes d'Al-Qaïda parmi les combattants rebelles a été passée sous silence.

La Libye, tout comme l'Iran et l'Irak, avait commis le crime impardonnable de défier le dollar américain.

L'intervention de l'OTAN en Libye a été suivie d'une guerre secrète en Syrie. On a pillé les arsenaux du gouvernement libyen et ces armes ont été expédiées, via la Turquie, aux rebelles syriens cherchant à renverser El Assad.

Il était déjà clair à ce stade, que nombre de ces combattants étaient liés à des organisations terroristes. L'appareil de la sécurité nationale étasunienne considérait néanmoins la chose comme un mal nécessaire. De fait, le Conseil des Relations Étrangères a publié en 2012 un article déclarant que "l'arrivée des jihadistes apporte la discipline, la ferveur religieuse, l'expérience de la bataille acquise en Irak, le financement des sympathisants sunnites du Golfe, et plus important encore, des résultats meurtriers. Bref, le FSA a actuellement besoin d'Al-Qaïda." (...)

Soyons clairs : les USA ont placé l'EIIL au pouvoir

En 2013, ces mêmes rebelles syriens liés à Al-Qaïda ont causé deux attentats au sarin. Le but en était de faire porter le chapeau à Assad et d'obtenir le soutien international permettant de déclencher une intervention militaire. Ils ont heureusement été dénoncés par l'ONU et les enquêteurs russes, et la pression exercée en faveur de frappes aériennes a complètement échoué lorsque la Russie est intervenue pour trouver une solution diplomatique.

La campagne pour le changement de régime en Syrie, tout comme en Libye, a utilisé le prétexte des droits de l'homme. De toute évidence, il ne s'agit pas là du vrai motif.

Le Qatar a proposé en 2009 de faire passer par la Syrie et par la Turquie un pipeline de gaz naturel destiné à l'Europe. Assad s'y est cependant opposé, et il a conclu en 2011 un pacte avec l'Irak et l'Iran pour faire passer un gazoduc à l'est, qui maintiendrait complètement à l'écart le Qatar et l'Arabie Saoudite.

Sans surprise, le Qatar, l'Arabie Saoudite et la Turquie sont les acteurs régionaux les plus agressifs dans leur volonté de renverser le gouvernement syrien.

Mais pourquoi ce différend à propos d'un gazoduc placerait-il la Syrie dans le collimateur de Washington ? Trois raisons :

1. Cet accord lié au gazoduc renforcerait de façon significative la position de l'Iran, leur permettant d'exporter vers les marchés européens, sans avoir à traverser aucun pays allié de Washington. Ce qui limiterait bien sûr le pouvoir du gouvernement étasunien.

2. La Syrie est le plus proche allié de l'Iran. L'effondrement de la Syrie affaiblirait intrinsèquement l'Iran.

3. La Syrie et l'Iran ont signé un accord mutuel de défense, et une intervention US en Syrie pourrait mener à un conflit ouvert avec l'Iran.

Cette partie d'échecs mondiale est montée en puissance en février 2014 dans un nouveau lieu : l'Ukraine. L'objectif visé était néanmoins la Russie.

La Russie, voyez-vous, se trouve être le deuxième exportateur mondial de pétrole, et ils sont non seulement une épine diplomatique dans le pied de Washington, mais les Russes ont également ouvert en 2008 une bourse de l'énergie, où les ventes se font en roubles et en or. Ce projet était dans les tuyaux depuis 2006. Ils s'emploient aussi avec les Chinois à écarter le dollar de toutes leurs transactions bilatérales.

La Russie travaille également à mettre sur pied une Union Économique Eurasienne qui comporterait l'adoption d'une unité de compte commune, et qui devrait bénéficier de son propre marché de l'énergie, indépendant.

La crise ukrainienne résulte d'un choix : soit d'entrer dans l'UE comme Etat associé, soit d'adhérer à l'Union Eurasienne. L'UE a insisté sur le fait que c'était soit l'un, soit l'autre. L'Ukraine ne pouvait faire partie des deux. En revanche, la Russie a affirmé que faire partie des deux à la fois n'était pas un problème. Le président Ianoukovitch a décidé de se mettre du côté de la Russie. 

En réponse, le système US de sécurité nationale a utilisé sa procédure habituelle : ils ont renversé Ianoukovitch et mis en place un gouvernement fantoche. (...)

Bien que tout ait semblé se passer correctement au départ, les USA ont rapidement perdu le contrôle de la situation. La Crimée a organisé un référendum et le peuple a voté massivement en faveur de la sécession d'avec l'Ukraine et pour la réunification avec la Russie. La transition s'est effectuée dans la paix et l'ordre. Personne ne fut tué, ce qui n'a pas empêché l'Ouest de considérer immédiatement tout l'événement comme un acte d'agression de la part de la Russie, et c'est devenu depuis le leitmotiv.

La Crimée est géopolitiquement importante par sa position sur la Mer Noire, qui permet l'envoi de forces navales en Méditerranée. Pendant la plus grande partie de l'Histoire récente, la Crimée a été territoire russe.

Les États-Unis poussent depuis des années à l'entrée de l'Ukraine dans l'OTAN. Un acte de ce genre placerait les forces étasuniennes sur la frontière russe et aurait pu avoir pour conséquence la perte pour la Russie de sa base navale en Crimée. C'est la raison pour laquelle la Russie a immédiatement accepté le résultat du référendum de Crimée et a rapidement consolidé son emprise sur le territoire.

Entre temps, en Ukraine Orientale, deux régions se déclaraient indépendantes de Kiev et organisaient leur propre référendum. Dont les résultats se révélaient à une majorité écrasante en faveur de l'autonomie.

Kiev a répliqué par ce qu'ils ont appelé des opérations anti-terroristes. En pratique il s'agissait d'une campagne de tirs d'artillerie aveugles, qui ont coûté la vie à des milliers de civils. Tuer des civils n'était apparemment pas considéré comme une agression par l'Occident. En fait, le FMI a clairement averti le gouvernement provisoire que leur prêt de 17 milliards de dollars pouvait être remis en question s'ils se révélaient incapables de réprimer le soulèvement en Ukraine Orientale. 

Alors que la guerre faisait rage contre l'Ukraine Orientale, des élections se déroulaient, et ce fut Petro Porochenko qui fut élu président. Il se trouve que Porochenko a été dénoncé en 2008 par un câble diplomatique révélé par WikiLeaks, où il est dit qu'il jouait les taupes pour le compte du Département d'État US depuis 2006. Ils l'appelaient "notre initié ukrainien" et la plus grande partie du document parlait des informations qu'il fournissait. (Un message séparé montrait que les États-Unis savaient Porochenko corrompu, même déjà à l'époque).

Il n'a cependant pas suffi à Washington d'avoir une marionnette en place pour lui permettre de gérer la crise. Que font les gens de Washington quand ils ne disposent d'aucun autre moyen de pression ? Ils imposent des sanctions, ils diabolisent et font des bruits de bottes (ou causent un événement sous faux pavillon).

Ce n'est pas une bonne stratégie quand il s'agit de la Russie. Cela s'est d'ailleurs déjà retourné contre eux. Les sanctions n'ont réussi qu'à rendre plus étroite la coopération sino-russe, et à accélérer le programme russe de répudiation du dollar. En dépit de la rhétorique, la Russie ne s'en est pas trouvée isolée pour autant. Les États-Unis et l'OTAN ont dressé une barrière entre eux et la Russie, mais pas entre la Russie et le reste du monde (cherchez le mot BRICS, si vous en doutez).

Ce nouvel axe anti-dollar dépasse le domaine économique. Ces pays-là comprennent l'enjeu. C'est la raison pour laquelle la Chine a proposé, dans le sillage de la crise ukrainienne, un nouveau pacte de sécurité eurasien qui inclurait la Russie et l'Iran.

Considérez-en les implications, à un moment où l'administration Obama commence à bombarder la Syrie, qui a signé par ailleurs un accord mutuel de défense avec l'Iran.

Il ne s'agit pas d'une version 2.0 de la guerre Froide. Mais de la version 3.0 de la Guerre mondiale. Les masses ne l'ont peut-être pas compris, mais c'est ainsi que l'Histoire le retiendra.

Les alliances comment déjà à se renforcer, et une Guerre Chaude est déjà en route sur de multiples fronts. Si les provocations et les guerres par procuration se poursuivent, la confrontation directe des principaux acteurs n'est plus qu'une question de temps, et cela mènera droit au désastre.

Tout ceci vous paraît-il aberrant ? Eh bien, vous avez raison. Les gens qui dirigent actuellement le monde sont fous, et le public se déplace en somnambule dans une tragédie.

Si vous désirez changer le cours des événements, il n'y a qu'une façon de le faire. Il nous faut éveiller ce public. Même les plus puissantes armes de guerre sont neutralisées si vous atteignez l'esprit de l'homme qui a le doigt sur la gâchette.

Comment éveillons-nous les masses, demandez-vous ? N'attendez pas que quelqu'un réponde à votre place. Soyez créatifs. Agissez comme si l'avenir de vos enfants et de vos petits-enfants en dépendait, parce que c'est le cas.

Fin de l'article]